audio écouter (.wav, 775k)


Stewart Bernard : Ma tante Alice a été la dernière à venir s’installer ici, elle est morte ici, d’ailleurs. Elle avait dans les quatre-vingt dix-huit, quatre-vingt dix-neuf ans. Mme Bernard : Presque quatre-vingt dix-neuf ans. Stewart Bernard : Ouais. Elle est partie quand elle était jeune, mais je ne sais pas à quel âge. Et en fait, quand elle est partie, Margaret lui parlait souvent pour essayer d’avoir des renseignements. Mais à cette époque-là, comme je disais, c’était pas trop bien vu d’être Autochtone, pas bien vu du tout… Alors, tu partais en laissant tes racines autochtones ici. Et puis, ben, quand quelqu’un te demandait ta nationalité, t’essayais d’esquiver la question, tu disais pas que t’étais Autochtone, tu vois ce que veux dire? Et en fait, elle a oublié plein de trucs, plein de trucs, elle avait même peur de revenir ici. Elle a pas voulu revenir pendant un bout de temps, à cause de tous les souvenirs qu’elle avait, t’sais, comment elle avait été traitée, pis tout ça, et c’est pour ça qu’elle voulait pas revenir. Mon oncle John, il était pareil. Il est parti d’ici pour aller s’installer à Salem, dans le Massachusetts, ou en tout cas, il a fini par se retrouver là-bas. On était là quand il est mort, pis on a regardé son certificat de naissance ou un papier du même genre. Ils ont demandé sa nationalité, évidemment, et il avait écrit qu’il était sujet britannique. Mme Bernard : Il n’a jamais dit qu’il était Autochtone. Stewart Bernard : Jamais dit qu’il était Autochtone. Il a jamais dit qu’il était blanc, bleu, vert, violet ou quoi que ce soit. Mme Bernard : En fait, ils veulent oublier. Stewart Bernard : C’est ce qu’il y a de triste, vraiment c’est… Et pis on se dit : « Bah, c’est le passé, il faut oublier »; mais aujourd’hui, il se passe la même chose dans les pensionnats. On peut pas oublier ça. Tu peux pas oublier comment on t’a traité.